Par les petits chemins nous passerons, nous qui sans fin petites gens serons, par les chemins usagés de l'Amour, avec nos pauvres pieds de chaque jour.
(...)
Ceux d'entre nous qui sont sages, le front au ciel heurtant des clartés, monteront
(...)
Dans la lumière où n'est plus d'astre aucun, que leurs pensers finiront tous en un.
La Vérité qui rejoint oui et non leur montrera — sans le dire — son nom simple où la nuit se jette dans le jour.Ils la verront. Ils connaîtront l’Amour...
Mais nous chétifs qui n’avons que nos pas sur les cailloux pour mener ici-bas notre troupeau, nous qui sommes bergers cherchant par terre un peu de quoi manger ;
Nous qui n’avons qu’un bâton dans la main, de pierre en pierre éprouvant le chemin, la Vérité, dans les nuages fous du ciel qui court, où l’arrêterons-nous ?...
Par les petits chemins nous passerons, nous qui sans fin petites gens serons, par les chemins usagés de l’Amour, avec nos pauvres pieds de chaque jour.
(...)
Avec nos corps nous trouverons l’Amour !
Avec nos pieds nous trouverons l’Amour, nous dont les yeux découvrent peu de jour, avec nos mains maladroites, nos mains qui sans voir clair partageront du pain.
Avec nos pieds nous trouverons l’Amour, nous dont la tête a le chemin trop court, avec nos pieds qui descendent au puits puiser de l’eau pour faire boire autrui.
Avec nos cœurs qui ne sont pas savants, nous trouverons l’Amour comme un enfant, un nouveau-né tombé du ciel au bord de la nuit noire et qui ne vit pas fort.
Comme un petit dans ses langes qui dort, à peine voit, ne parle pas encor, nous porterons, serrée entre nos bras, la Vérité que nous ne savons pas.
Marie Noël, dans Les chants de la merci
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